• Elle cherche ses mots dans le torrent noir qui emplit sa tête. Elle sent sur ses joues des larmes qui ne coulent pas , elle entend dans sa poitrine son cœur qui se brise. Elle cherche à trouver des mots, des phrases, pour traduire ce poids sur ses épaules, ces sentiments qui la brisent. Elle ne sait même pas si ce qu’elle ressent porte un nom. Elle sent juste cet estomac qui se serre, cette gorge qui la brûle, cette boule qui grossit. Son esprit en perdition tente de comprendre le noir, la peur, l’angoisse qui sont devenus ses compagnons quotidiens. Elle a peur, elle est effrayée. Elle refuse de voir ce qui se passe, ce qui la tue petit à petit, jour après jour. Elle a peur de la perdre. Peur de devenir une ombre, de passer au second plan. Chaque jour, elle s’efface peu à peu au profit d’une autre. Elle a peur de la perdre. Pourtant elle sait qu’elle ne le fait pas exprès. Elle le sait, elle le sent. Elle la connait et elle sait que jamais elle ne lui ferait de mal pour s’amuser. Et pourtant, elle a mal. Son cœur se serre chaque jour un peu plus quand elle redécouvre qu’elle s’efface. Elle veut verser des larmes mais elle n’y parvient plus. On lui dit qu’on perd ainsi parfois des amis, même proche, qu’ainsi va la vie. Mais alors, pourquoi continuer à vivre ?    


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  • Lundi matin, 8 heures. Dur moment, certainement le plus éprouvant de toute la matinée. Des lycéens mal réveillés avancent dans un bruit de semelles usées vers les portes embuées des bâtiments abritant déjà les premiers adolescents pour qui le réveil a sonné bien plus tôt. Des talons claquent sur le carrelage déjà glissant et recouvert de feuilles mortes rapportées par des crampons boueux. Ils avancent, tirant plus ou moins une tête d’enterrement, suivant les emplois du temps qui rythment leur journée. Des bruits de bruyantes embrassades emplissent l’air, aux côtés des grandes claquent partagés entre amis d’une même bande. Ils se retrouvent après des weekends très différents et semblables à la fois. Des yeux mi-clos après des nuits courtes et des estomacs encore retournés après des abus grisants côtoient les intellos qui ont préférés rester au calme ou se plonger dans des révisions. Ils partagent tous la même difficulté à mettre en route des neurones qui auraient bien besoin de quelques heures de sommeil. Certains les rattraperont durant un cours de maths particulièrement soporifique, les autres attendront le soir, certainement au détriment des questions de philo. Mais, avant de rentrer chez sois après une longue journée où défileront des professeurs aux cheveux gris ou au caractère sadique, ils réciteront cours de géographie, étudieront des philosophes morts et enterrés depuis plusieurs millénaires, réfléchiront sur des lois scientifiques et surtout regarderont l’aiguille des heures glisser doucement, poussée par un escargot, vers l’heure tant attendue de 17h. Lycée, lieu où tous les élèves veulent fuir et où tous les parents rêvent de retourner. Paradoxe à résoudre. Vous avez deux heures.    


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  • Je m’assoie sur le bord du lit, prête à bondir si quelqu’un s’approche. Enfin, bondir… Avec la jupe que je porte –qu’on m’a forcé à porter !-, ça va être un peu dur d’être rapide. J’ai du mal à marcher avec alors bondir ! J’ai les mâchoires serrées et  de la sueur glacée coule dans mon dos. Plus le temps passe, plus le stress monte. Cette attente est insoutenable. J’ignore ce qui se trouve derrière cette porte. Amis ou ennemis ? Vampire ou humain ? Une foule de question m’assaille. Qui m’a kidnappée ? Pourquoi ? De l’argent ? Une vengeance ? A cause de Julian ? Car je suis une chasseuse de vampire ? Ils veulent venger leurs congénères ? Alors pourquoi ils me gardent ? Je suis perdue, des hypothèses me traversent l’esprit mais je les réfute les une après les autres. Je suis plongée dans mes pensées quand la porte s’ouvre. Je me lève brusquement pour ne pas me laisser dominer.

    Le même type que tout à l’heure se tient dans l’embrassure de la porte.

    « Si vous voulez bien me suivre. »

    Je le suis donc. La chambre donne sur un couloir du même style que ma chambre. Pas de fenêtre, juste des portes à perte de vue. Nous descendons un escalier. Je suis forcée de me tenir à la rampe si je ne veux pas m’affaler dans les marches. Saleté de robe !

         L’escalier aboutit sur un salon. Toutes les fenêtres sont bouchées par de lourd rideau bleu marine. Pas un rayon de soleil, la pièce est éclairée par des bougies aux murs et une cheminée, où un feu brûlait joyeusement. Assise sur les canapés face à cette cheminée, une femme me tournait le dos. Ses épaules ne bougent pas et je sus immédiatement à quel genre d’espèce j’ai à faire. La question qui possède une réponse, reste le pourquoi.

    « Madame, dit le serviteur. La voici.

    -Bien, répond-elle. Laisse-nous.

    -Bien Madame. »

    L’homme s’incline brièvement avant de s’éclipser par une porte située au gauche de l’escalier.

    « Viens devant moi jeune fille, m’interpelle la femme, sans daigner se tourner. »

    Je ravale ma fierté, consciente que je suis dans une très mauvaise position. Je contourne le canapé avec crainte. Les dents serrées, je jette un coup d’œil vers la femme. Je m’arrête net.

    « Viens, petite, je ne vais pas te manger. »

    Je ne l’écoute pas et la détaille sans gêne. J’ai l’impression de me voir dans une glace. Même forme du visage, même bouche fine, même nez un peu trop retroussé, même forme des yeux. Sauf ces cheveux qui sont brun. J’aurais cru à une mauvaise blague si ses yeux rouges ne prouvent pas que je n’aie pas à faire à un miroir.

    « Qui êtes-vous ? demande-je.

       -Allons, assis toi avant de commencer avec toutes les questions qui doivent d’assaillir l’esprit. »

    Je la regarde de biais et je m’assoie dans le fauteuil face à elle, qu’elle me montre. Je ne la quitte surtout pas des yeux.

    « Veux-tu du thé ? reprend t elle. »

    Du thé ? Non mais puis quoi encore !

    « Non, répond-je sèchement. Je répète, qui êtes-vous ?

    -Allons, allons, ne soit pas si pressée. J’ai tout le temps devant moi.

    -Pas moi.

    -Quelle impatiente ! Enfin bon, puisque tu y tiens temps, je me présente, Flora De Matignac. Comme tu as pu le constater par toi même, je suis un vampire. Née de parents vampires puis transformée. Et je suis aussi ta mère. »

    Je la fixe, les yeux ronds comme des soucoupes, la bouche grande ouverte. Non, c’est impossible ! Pas elle ! Surtout pas ! Jamais !

    « Je ne vous crois pas, souffle je. C’est impossible.

    -Ma chérie, c’est pourtant la vérité. Tu ne peux nier l’évidence. Avoue que la ressemblance est flagrante.

    -Je ne vous crois pas ! Je ne suis pas une fille de vampire ! Je ne suis pas un monstre !

    -Larina ! coupe une voix d’homme, ne parle pas ainsi à ta mère. »

    Un homme vient entrer dans la pièce. Il domine par sa stature. Il me regarde de haut. Lui ne me ressemble absolument pas, si ce n’est qu’il a les cheveux blonds comme les miens.

    « Louis, comprend la, ce ne doit pas être facile pour elle d’apprendre tout cela. Larina, je te présente ton père. »

    L’homme me transperce avec ses yeux rouges écarlates. Non, je n’y crois pas. Je refuse d’y croire ! Et pourtant… Ils me ressemblent tellement…

    « Non, m’étrangle-je. Je ne veux pas ! C’est tout simplement impossible ! Vous n’êtes pas mes parents ! Je n’ai pas de parents ! hurle-je

    -Larina, ne crie pas comme cela ! répond l’homme.

    -Louis, le coupe la femme, assis toi ! La pauvre chérie, elle doit être toute perdue. Mon enfant, calme toi. Je comprends que cela…

    -Vous ne comprenez rien ! cris-je. Et je ne suis pas votre enfant ! Jamais ! »

    Je suis debout. Je hurle à m’en faire péter les tympans. Ils parlent mais je ne les écoute pas. Je ne suis pas leur fille ! Je ne suis pas leur enfant ! Je ne suis pas Larina ! Je ne suis pas un monstre ! Pas un monstre ! Pas un monstre !

    « Les enfants de vampires dégagent une certaine odeur très particulière. Elle est détectable lorsqu’on fait très attention. De plus, ils sont souvent très pâles. Ce qui est ton cas. »

    Julian. Il est le premier à m’avoir dit cela. Alors, il avait raison ? Non ! Non. Je sens des larmes qui glissent le long de mes joues. Je tremble. Je ne veux pas être un monstre.

    « Te rends-tu compte enfin à l’évidence ? me demande l’homme. »

    Je me suis rassise, les joues baignées de larmes. Je claque des dents. Pourquoi ? Pourquoi moi ?

    « Maintenant que tu es plus attentive, je vais te raconter ton histoire, continu l’homme. Tu es ma fille et celle de Flora. Tu as une sœur jumelle, Annabelle. Comme nous deux, vous êtes des enfants de vampire. Plus puissante que n’importe quel autre vampire. Votre devoir est d’avoir d’autres enfants avec un vampire avant de devenir vampire à votre tour pour créer des générations de vampire toujours plus puissant.

    -Non… pleure-je. Je ne suis pas un vampire. Annabelle n’était pas ma sœur.

    -Si, martèle l’homme. Tu es une fille de vampire. Ton devoir est de créer des vampires toujours plus forts.

    - Non, non, non, non, non, répète-je.

    -Si ! hurle maintenant l’homme.

    -Louis, souffle la femme, laisse la réaliser. Elle apprend tout cela d’un coup.

    -Cela ne serait pas arrivé si elles étaient restées avec nous ! Si nous les avions élevées !

    - Calme-toi. Tu sais très bien que c’était tout bonnement impossible ! Nous étions de si jeune vampire, nous les aurions tuées ! Alors calme toi maintenant et laisse moi m’en occuper ! »

    Au travers mes larmes, je vois l’homme partir, la tête haute. La femme s’approche de moi. Elle veut me prendre dans ses bras. Je la pousse violement. Visiblement, elle est blessée de se voir ainsi rejetée.

    « Ecoute, ma chérie, tu vas aller te reposer et nous reparlerons de tout ça tête reposée.

    -Annabelle est morte.

    -Comment ?

    -Annabelle est morte ! hurlé-je. Tuée par un vampire ! Elle est morte dans mes bras ! Morte tu m’entends ! »

    Elle a reculé. Elle est sous le choc. Je me lève et je me mets face à elle.

    « Morte tu m’entends ! Tuée ! Assassinée ! A cause de vous ! C’est pourquoi que je vais tous vous tuer les uns après les autres ! Tous ! Même toi ! Tu vas mourir ! Vous m’avez arrachée la personne que j’aimais le plus au monde, je vais vous arracher votre vie !

    -Et moi je vais t’aider, me coupe une voix devenue familière. »

    Je me retourne. Julian !

     


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  • La porte claque. De pas frappent le carrelage sombre. Le silence qui accompagne ces sons devient plus opaque à chaque bruit de botte. Des paires d’yeux suivent l’homme à l’uniforme noir. Des yeux bleus, noirs, verts, marrons. Tous emplis de haine, certains de désespoir.

    Mickael attend. Les genoux entre ses bras, il regarde la porte face à lui. Le mur sur lequel repose son dos le glace. Mais il s’en fout. Bientôt, il ne ressentira plus rien. Que dalle ! Il entend comme tous les autres les pas dans le couloir. Il sait, comme chacun ici, ce que cela signifie. Certains ont peur lorsque ces pas se stoppent à leur porte. Pas lui. A quoi bon ? Avant il tremblait de peur à l’idée de ce qui l’attendait. Plus maintenant. Peu à peu, il s’est fait une raison. Au moins, il ne restera pas ici à moisir jusqu’à ce que ses os entrent dans le mur. Il partira avant.

    Les pas s’arrêtent. Des clefs sonnent entre elles. Une s’introduit dans une serrure. Le verrou. En face de l’uniforme, un homme debout le regarde. Ses cheveux bruns, luisant de saleté, tombent sur ses épaules. Sa barbe date de quelques jours. Tout son corps semble fatigué. Pourtant, la brillance et la volonté de son regard rappellent à l’officier l’âge de cet homme : 24 ans. Ils se regardent. Le soldat, derrière son regard inflexible, a pitié de ce gamin. Mais bon, tout crime mérite une sentence. Le sien particulièrement.

    « Mickael McFayt, suivez-moi en silence. »

    L’homme n’ajouta rien. Il sortit sans un regard en arrière. L’officier ferma la cellule et prit la tête du cortège. Des yeux suivirent les hommes. Ils traversèrent le couloir. Mickael passa la porte de fer sans un bruit. Ses derniers moments se déroulaient. La porte claqua. Le silence se fit.  


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  • Des vêtements sont posés sur le tabouret de la coiffeuse. Ce ne sont pas mes affaires, j’en suis certaine. Je lève une robe rouge bordeaux, à la jupe bouffante et avec un corset. Un corset !! La personne qui vient de m’enlever veut me faire porter un corset !!!! Mais on ne m’a pas enlevée, on m’a changée d’époque ! Qui porte des corsets au XXIème siècle ? Une idée me traverse bien l’esprit mais je préfère éviter d’y penser. Personne ne porte de corset aujourd’hui puisque ce n’est pas à la mode ni d’actualité. Mais si mes ravisseurs ont traversé les siècles, alors peut être que dans leur mentalité de vieillard un corset, c’est encore portable. Mais s’ils ont traversé les siècles et que je n’ai pas de pieu comme maintenant, je suis mal. Très mal ! Enfin bon, il reste peut être un peu d’ail dans la cuisine ! Mais dans un repaire de vampire, la probabilité qu’un tel miracle se déroule, frise les 0%. Aller ! Quand il y a de la vie, il y a de l’espoir. Ma vie risque bientôt de se finir mais je peux toujours croire.

    Je bataille avec cette saloperie de corset. Pendant que ce truc m’étouffe, je ne cesse de me répéter : comment faisait les bonnes femmes du moyen âge ou de la renaissance pour porter ces étouffoirs. Lorsque je finis tant de bien que de mal à l’enfiler et après avoir réussi à retrouver mon souffle, j’enfile la robe qui accompagne cet objet de torture. Bien plus simple à enfiler, elle m’empêche néanmoins de bouger librement. Je peste contre cette situation. J’espère que ma déduction de tout à l’heure est fausse sinon, je suis très, très mais alors, très mal !      


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